Hommage rendu le jour des obsèques [1]
de Léon
Noguéro
par son ami
et camarade Joseph Campo
« J’ai le devoir, bien pénible aujourd’hui, au
nom des anciens combattants d’Arreau et d’Ancizan, au nom de la Fédération
départementale des anciens combattants et victimes de guerre, au nom de ses
amis aussi, de rendre un dernier hommage à Léon Noguéro, Président de la
section des anciens combattants d’Arreau et ami de tous.
Léon Noguéro est né à Cadéac, le 16 août 1913, dans
une famille de trois enfants dont l’aîné mourra pour la France pendant la
guerre 14-18. Mis très tôt à l’école du travail, il fera son apprentissage
d’électricien. Il accomplira son année de service militaire dans l’Infanterie,
à Brive, du 16 octobre 1934 au 15 octobre 1935.
Le 5
septembre 1939, il est mobilisé avec sa classe et rejoint le 49e
régiment d’Infanterie à Bayonne. C’est avec ce régiment qu’il fera la Campagne
de France avec le grade de caporal. On sait ce qu’il advint de cette campagne
malgré la vaillance de nos soldats, quoiqu’on en ait dit, qui durent accepter
la défaite. Léon Noguéro était de ceux-là et il est fait prisonnier à Saint Dié
le 20 juin 1940. Et alors commencera une longue période de captivité, derrière
les barbelés, captivité qui durera cinq ans, cinq longues années au cours
desquelles il connaîtra, loin de sa famille, de ses Pyrénées, de sa patrie, les
privations et les souffrances morales et physiques qui furent le lot des
prisonniers. Mais, c’est au stalag V-A qu’il connaîtra cette camaraderie et
cette solidarité qui ont marqué à vie les prisonniers, et, en particulier Léon
qui n’oubliera jamais et qui ne cessera d’en faire sa ligne de conduite.
Libéré des
camps le 18 mai 1945 et démobilisé le 31 juillet, il reprit son métier
d’électricien et fonda en 1948 un foyer qu’il établit à Cadéac et qui lui
donnera trois fils, Jacky, Jean-Bernard et Henri.
Adhérent de
la première heure de l’association des anciens combattants et prisonniers de
guerre, il en a été toujours un membre très actif, participant à toutes les
manifestations, à toutes les réunions, à toutes les commémorations où il aimait
retrouver ses camarades, dans l’esprit de l’amicale solidarité qui les
unissait, traduisant cette solidarité en actes spontanément quand c’était
nécessaire. Puis est venu le temps des responsabilités, comme trésorier de la
section des A.C.V.G.[3] d’abord, comme
président de la section des Anciens Combattants d’Arreau et de la section des
A.C.V.G. ensuite succédant à notre regretté camarade Jean Duffourc. Et
c’est dans l’action commune, dans nos sections respectives d’Arreau et
d’Ancizan que se sont renforcés les liens qui nous unissaient jusqu’à devenir
une fraternelle amitié. Il faut avoir agi côte à côte avec le président Léon
Noguéro pour savoir ce qu’était son dévouement exemplaire à la cause et au
service des anciens combattants, ses camarades. Il s’intéressait
individuellement à chacun d’eux, leur rendant visite, s’inquiétant de leurs
problèmes de santé. C’est de concert que nous organisions les cérémonies
commémoratives du 11 novembre, du 8 mai, de la journée des déportés, nous
efforçant de maintenir le culte du souvenir. Nous participions ensemble aux
réunions du conseil fédéral départemental. Il avait rallié les isolés du canton
voisin. Il avait le souci de l’union des générations du feu comme en témoignent
nos relations avec les anciens d’Algérie. Il a souvent porté le drapeau
lui-même, péniblement quelquefois. C’est avec tristesse qu’il a pris acte, il y
a quelque temps, de la dissolution de la Fédération départementale des A.C.P.G.
par suite de la difficulté à trouver des responsables – ce qui est de plus en
plus fréquent. Voilà ce qu’était Léon ancien combattant. Il était l’exemple
même et, après lui, rien ne sera comme avant. Il me faut aussi dire quelques
mots de l’homme. Au cours d’une longue activité professionnelle d’artisan
compétent, consciencieux et apprécié, il a formé des générations d’électriciens,
dont deux de ses enfants, et tous lui doivent leurs qualités dans le métier. Une
voix autorisée vous parlera de sa participation à la vie publique.
Il laisse un
grand vide dans sa famille, dans tous les endroits où il aimait se retrouver,
dans ce village de Cadéac où on voyait quotidiennement et régulièrement sa
silhouette familière.
Léon avait
le culte de l’amitié. Il était aimé et estimé de tous par son amabilité, sa
gentillesse, sa serviabilité, sa droiture. Il aimait rencontrer ses amis et
nous aimions le rencontrer. Nous nous retrouvions presque toutes les semaines
pour passer un moment agréable et c’est ainsi que nous qui l’avons vu toujours
alerte, malgré son âge, nous avons connu les premières atteintes du mal
auxquelles il a toujours fait face avec un courage et un moral qui nous
étonnaient. Depuis la fin de l’année dernière, nous le savions de nouveau
malade et nous pensions qu’une fois encore il surmonterait l’épreuve.
Hélas ! Il nous a quittés après plusieurs hospitalisations et de longues
semaines de souffrance et de combat courageux contre ce mal qui détruit à petit
feu et nous avons vécu cette lente et pathétique détérioration de sa santé
malgré tous les soins de sa famille et de la médecine. Il aimait la vie et il
s’y est accroché avec une grande dignité jusqu’au dernier instant.
En ces moments de peine et de déchirement, à Paulette
sa compagne de toute une vie, à vous autres Jacky, Jean-Bernard et Henri, ses
enfants qu’il chérissait et qui sont marqués de son empreinte et de son
exemple, à David et à Jean Matthieu, ses petits-enfants dont il était fier,
j’exprime au nom de ses camarades de la Fédération départementale des A.C.V.G.,
au nom de ses amis, toute notre sympathie attristée. Que cette sympathie
apporte un peu de baume à votre chagrin dans cette bien douloureuse épreuve.
Et toi, cher Léon, notre ami, notre camarade,
maintenant que tu rejoins dans ce cimetière les anciens combattants que tu as
si pieusement accompagnés, au moment d’incliner sur ta tombe ces drapeaux qui
t’étaient si chers, sachant que tu emportes avec toi l’insigne des barbelés, au
nom des anciens combattants, au nom de tes amis, en mon nom personnel, je
t’adresse notre suprême adieu. Dors en paix, tu l’as bien mérité. Ton souvenir
restera dans nos cœurs.
Adieu
Léon. »
Joseph Campo [4] 65 Fréchet-Aure
[1] Cérémonie
religieuse et inhumation au cimetière de Cadéac, le 31 août 2004.
[2] Crédit photo,
Gérard Latour, correspondant de presse « La
Dépêche du Midi » du canton d’Arreau.
[3] « Anciens Combattants et Victimes de
Guerre » relevant de la Fédération Départementale des Mutilés,
Combattants et Victimes de Guerre, 5 rue Georges Clémenceau, 65 Tarbes.
[4] « Joseph
Campo a été maire de Fréchet-Aure de 1977 à son décès en janvier 2013. En 2011,
il était devenu le doyen des maires de France, ce qui lui a valu l'attribution
de la Croix de chevalier de l'ordre national du Mérite. Né le 15 juillet 1919,
il s'est vu décerner en 2011 le grade de chevalier dans l'Ordre national de la
Légion d'honneur en tant qu'ancien combattant de la guerre 1939-1945 : affecté
au Maroc en 1940, il débarque en Italie en 1942 dans le Corps expéditionnaire
français puis prend part aux combats du Monte Cassino, du Garigliano et de
Sienne, où il est grièvement blessé. Officier des Palmes académiques pour son
parcours d'enseignant au collège d'Arreau, il a également été conseiller
général du canton d'Arreau de 1979 à 1992. » Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Fr%C3%A9chet-Aure